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Les Cahiers de l'Ircam: Compositeurs d'aujourd'hui: George Benjamin, n° 10, juin 1996
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J'ai donc d'abord rencontré l'homme, mais la musique est venue tout de suite après. J'ai dû demander des partitions et je me souviens que j'ai dirigé Ringed by the Flat Horizon avec l'orchestre de la BBC en 1988. Un peu plus tard, j'ai joué avec l'Ensemble Intercontemporain, nous sommes allés à Badenweiler et à Prague avec At First Light. Ce sont les deux oeuvres que j'ai personnellement dirigées.
Quand il s'est agi de recruter des compositeurs pour l'Ircam, j'ai pensé à George Benjamin et puis nous lui avons commandé une oeuvre, Antara, pour le dixième anniversaire du Centre Georges-Pompidou, en 1987. Il n'avait pas d'expérience en électroacoustique ou en informatique musicale, mais, puisqu'il était curieux par lui-même, je n'ai pas eu à le forcer à venir. Quand je vois quelqu'un comme lui, je sais qu'il s'agit d'un compositeur qui connaît le métier. Selon les mêmes principes, nous avons invité à l'Ircam par exemple Magnus Lindberg, Marco Stroppa, Marc-André Dalbavie ou bien Philippe Manoury au départ. J'ai été très exigeant pour tous les gens que j'ai fait venir ou qui sont venus à l'Ircam. Je trouve qu'il est essentiel, surtout quand on entre dans le domaine de l'expérimentation, de connaître son métier à fond, d'avoir une pensée et une culture musicales. George Benjamin n'est pas venu à l'Ircam pour camoufler quelque chose, mais au contraire pour étendre son vocabulaire et son champ d'action.
La caractéristique première de George Benjamin est une certaine spontanéité: une certaine spontanéité de geste, une certaine fraîcheur d'approche qui est propre aux gens qui ont une vingtaine d'années. S'ils ne sont pas spontanés à ce moment-là, ils ne le seront jamais ! Il avait une bonne oreille, les accords qu'il écrivait étaient des accords entendus, de même que son instrumentation, c'est-à-dire qu'il avait non seulement une conception mais aussi une oreille. Il est très imporant que les gens n'écrivent pas seulement sur le papier des sortes d'images fictives, il importe que ces images correspondent à une réalité. George Benjamin avait été l'élève de Messiaen, qui lui avait certainement appris à écouter, en tout cas à affiner son sens de l'audition. Mais je ne retrouve pas le style de Messiaen dans sa musique. L'influence de Messiaen se situe à un niveau plus général, c'est-à-dire au niveau du contrôle de ce que l'on fait.
Il y a également de la tradition anglaise dans sa musique, dans sa spontanéité. Je ne le prends pas dans un mauvais sens, mais c'est le côté amateurisme. Au sens d'un professionnel qui ne se contraint pas par des lois exagérées, par des réflexions trop systématiques. Il a cette réflexion, mais en même temps il sait s'évader d'un système trop rigide qui lui enlèverait sa spontanéité. Ce qui est typique de la musique anglaise.
Après Messiaen, George Benjamin est allé étudier à Cambridge avec Alexander Goehr, qui lui a transmis ce qu'il y a d'important dans la tradition germanique. Si bien que le côté segmentation formelle, typique de Messiaen, s'est effacé devant une continuité de l'élément auditif.
J'ai suivi son évolution au fur et à mesure, il m'a toujours fait parvenir ses oeuvres. J'ai entendu récemment Sudden Time, que je trouve vraiment très bien conçue pour l'orchestre.
Propos recueillis par Risto Nieminen (février 1996)
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